L’amour et la crise : cause à effet ?

Les relations amoureuses seraient liées à la carrière et au contexte économique...

Tsunami et nouvelle preuve (s’il en fallait encore une) que les ados ne pensent qu’à eux et à l’argent : ce sont les résultats de l’étude Meetic-Opinion Way sur les relations amoureuses... Ici est exposé que la génération Y, déjà traitée d’« égoïste" et de "paresseuse », serait de surcroit « calculatrice » et « insensible » en amour. On nous dit également que « plus de la moitié des Français de 18 à 34 ans estiment gérer leurs relations sentimentales comme leurs carrières" ».

Dans un contexte où l’on nous rabâche sans arrêt les oreilles avec la rigueur budgétaire et les chiffres désastreux de la situation nationale, cela nécessite de fouiller d’un peu plus attentivement ces « études-buzz » sur le sexe et l'économie... Enquête .

C'était mieux avant au bal du village

Le sociologue Pascal Lardellier surenchérit joyeusement sur l'étude d'Opinion Way et établit une ressemblance – discutable – entre gestion de la vie amoureuse et professionnelle. En fait, il rapproche le speed-dating d’entretien d’embauche et celui de la séduction. Une idée phare : « Sur le net, pour bien draguer, il convient d'avoir un rendement, une efficacité, une rentabilité optimum. Le speed-dating, calqué sur les entretiens de recrutement, avait bien ouvert la voie. Sept minutes pour se faire embaucher ... ou pour séduire. Sinon, au suivant, à la suivante ! ». Le milieu professionnel et ses contraintes de performance économique entacheraient donc désormais la vie amoureuse – et ses performances sexuelles – dans une même logique de rendement, d’efficacité, de rationalité... Intéressante marotte que celle du web transformant notre bonne séduction artisanale en drague industrialisée… N'y aurait-il pas une confusion entre la multiplication des rencontres rendues possibles par le Net et une dévalorisation fantasmée de la qualité de ces rencontres et des relations qui en aboutissent ? Autrement dit, la séduction 2.0 permet de contacter beaucoup plus de gens, mais pourquoi forcément penser que ces rencontres sont moins authentiques et romantiques qu'avant ?

C'est connu, les jeunes ne pensent qu’à ça…

D'ailleurs, revenons sur les conclusions dramatiques de la soi-disant "étude" Meetic-Opinion Way. En y regardant de plus près – c'est-à-dire en jetant un coup d’œil soi-même aux résultats de l’étude, on constate qu’il s’agit d’une interprétation orientée des chiffres, non d’une quelconque réalité sur le cynisme des jeunes. Oui, parce qu’en fait, la question des enquêteurs était ainsi formulée : « Diriez-vous qu’aujourd’hui, on gère de plus en plus sa vie amoureuse comme sa carrière ? ». Mais voilà, le  "on" impersonnel de la question pousse indéniablement les gens à répondre plus volontiers "oui" car ils ne parlent pas d’eux, mais fantasment sur les autres. Si la question avait été : gérez-VOUS votre vie amoureuse comme VOTRE carrière, le chiffre se serait effondré. D’ailleurs, à la question suivante, les 18-24 ans sont – avec les 50-59 ans, c'est-à-dire leurs parents… Hasard ? – les plus romantiques et déclarent à 56% que pour qu’une relation amoureuse fonctionne, il vaut mieux être passionné(e) dans le choix de son partenaire (41% estiment qu’il vaut mieux être pragmatique). Loin de n’être qu’un paradoxe de plus d’un sondage à l’emporte-pièce, ces chiffres étonnants au premier abord sont peut-être la preuve que la corrélation entre réalisme économique et sexualité n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît…

 

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