Je ne tombe pas enceinte : mais je préserve mon couple !

couple qui se dispute dans le lit

Calcul des périodes d'ovulation, culpabilité et prise en charge médicale, pas toujours facile de concilier désir d'enfant et plaisir amoureux. On vous explique comment le vivre au mieux !

On parle d'infertilité quand un couple désire un enfant et ne parvient pas à en avoir après douze à vingt-quatre mois d'attente : Ce problème touche un couple sur six et motive 60 000 consultations par an en France.

Quant à l'origine de cette infertilité, elle est assez équitablement répartie entre l'homme, la femme, le couple (à peu près 30 % chacun) et 10 % pour lesquels on ne sait pas.

Dès les premières consultations, la question de la fréquence des rapports sexuels est posée. Certains couples n'ont pas de vie sexuelle et doivent être orientés d'abord vers un sexologue. D'autres ont des rapports une fois par semaine, ou tous les quinze jours.

Or, avec un rapport par jour, le taux de grossesse est trois fois plus important qu'avec un rapport par semaine.

Faites l'amour sans "calcul"

La première perturbation est de réduire la sexualité à la reproduction et de s'astreindre à faire l'amour aux périodes fertiles, en usant de tests d'ovulation, de courbes de température. Certaines femmes ont des rapports programmés. Elles sollicitent leur mari au moment de l'ovulation, ce qui est mal vécu par l'homme qui a l'impression de ne pas être désiré.

Ce dont témoigne Augustina : « Avant que les examens ne révèlent nos problèmes respectifs, je calculais tout le temps pour savoir quel était le bon moment. Je ne le disais pas à mon mari, car ça l'énervait ! Mais quand on a su quels étaient les problèmes, ça ne servait plus à rien de calculer, alors c'était juste quand on avait envie. »

Lors des traitements hormonaux pour augmenter la fécondité, ce genre de problèmes peut resurgir : les protocoles de fécondité cassent la sexualité des couples qui s'obligent à faire l'amour plusieurs fois par jour. Cet acharne- ment peut créer un couple sans désir.

Mais il peut aussi sembler au couple que les rapports sexuels n'ont plus d'utilité puisqu'ils ne peuvent servir à la grossesse. C'est ce que raconte Nabilla, enceinte de trois mois après une FIV Icsi (fécondation in vitro avec micro-injection d'un spermatozoïde) :

« Après l'annonce du problème, nous avons eu une période d'abstinence. J'étais focalisée sur le fait qu'un rapport devait servir à procréer et je ne pouvais m'empêcher de me dire que ça ne servait plus à rien de faire l'amour. J'avais occulté le plaisir de l'acte. Mais mon mari a très bien compris la situation. Il était plus tendre que jamais, et a attendu que le désir me revienne. »

Certains couples s'astreignent aussi à l'abstinence, en espérant une meilleure qualité de sperme. Mais cela n'a aucun fondement biologique de pratiquer l'abstinence dans ce but. En faisant l'amour tous les jours, on peut diminuer le volume de l'éjaculation et le nombre de spermatozoïdes mais pas le pouvoir fécondant.

Et pendant les quelques jours d'abstinence obligée avant un prélèvement, rien n'empêche les moments intimes :  La sexualité du couple ne se résume pas au coït.

La médicalisation entre dans l'intimité

Quand le couple est pris en charge médicalement, il y a une intrusion de la médecine dans les relations sexuelles. C'est le cas avec le test post-coïtal, qui permet de connaître le comportement des spermatozoïdes dans la glaire cervicale (liquide sécrété par le col de l'utérus) de la femme, et de savoir s'ils sont capables de rejoindre les ovocytes.

Quoique très informatif d'un point de vue médical, ce test est la prescription d'un rapport sexuel ! C'est comme si le médecin était assis au bord du lit.

Au cours des traitements aussi, il peut y avoir prescription de rapports sexuels comme le raconte Anne : « Pendant les traitements, à un moment le médecin nous disait de beaucoup faire l'amour pendant deux- trois jours puis de revenir le voir pour vérifier si ça avait fonctionné. Et ce n'est pas drôle quand quelqu'un d'extérieur nous dit quand avoir des rapports ! Il faut mettre toutes les chances de notre côté, parce qu'on ne peut pas retourner voir le médecin et lui dire qu'on n'a rien fait du tout. »

Pour éviter les stimulations répétées, laisser le corps se reposer et aussi pour revivre une vie de couple normale sans être obnubilé par la grossesse, les gynécologues préfèrent souvent faire des pauses entre les traitements.

Pour les couples, la procréation médicalement assistée est toujours une épreuve.

Des examens lourds et parfois dévalorisants

La prise en charge commence par de nombreux examens. D'abord, l'homme doit faire un spermogramme, qui permet de connaître le nombre de spermatozoïdes, leur forme et leur déplacement.

Et ça n'est pas une partie de plaisir, comme en témoigne Jane, qui après plusieurs FIV Icsi, a réussi à avoir des jumelles : « Les laboratoires pour les spermogrammes sont vraiment glauques. Nous avons fait ensemble tous les examens. Heureusement, car mon mari n'aurait pu aller bien loin. »

En effet, même si cet examen est indispensable dans la prise en charge, il est une épreuve pour les hommes, qui doivent se masturber sur commande. Les résultats aussi peuvent être mal vécus. Les hommes se voient jugés comme individus capables de procréer. Ils s'identifient à leurs spermatozoïdes ("pas très nombreux" "un peu ralentis").

L'insémination artificielle, qui consiste à introduire médicalement le sperme dans la cavité utérine, est également assez difficile pour l'homme car il délègue sa mission à un autre.

C'est assez dévalorisant pour lui car il a l'impression de n'avoir pas fait grand-chose. Mais toute la pression médicale s'exerce sur les épaules de la femme lors des traitements, même si c'est son mari qui est à l'origine de l'infertilité.

Et ceux-ci peuvent avoir des effets secondaires : prise de poids, fatigue, sécheresse vaginale, baisse de désir. Dans ces cas-là, les relations peuvent être tendues au sein du couple : en vouloir à l’autre d'avoir à subir tous ces traitements, par exemple, relatant un sentiment d’injustice.

Parfois, le couple se remet en question quand bébé ne vient pas

Le fait pour l'homme d'être obligé de laisser sa femme porter ce poids, parfois d'être à l'origine du problème, engendre souvent culpabilité et dévalorisation. Ce qui provoque des symptômes sexuels masculins classiques tels que dysfonction érectile et éjaculation précoce, ces deux troubles n'étant pas présents auparavant. Un cercle vicieux peut s'installer.

Mieux vaut alors consulter un sexologue. Par-delà les questions de sexualité, le couple même est parfois remis en question. D'où l'importance de ne pas être trop intransigeant et de dialoguer un maximum, comme le fait de ressentir de la culpabilisé et s'en vouloir de ne pas "être normal". Si la communication est absente, certains couples témoignent en avoir frôlé le divorce.

Il est en tout cas important de considérer que la fécondité, comme la sexualité, se fait à deux. Quand la cause n'est pas déterminée, il faut se garder de toute interprétation, ne pas penser que c'est le corps de l'un qui rejette l'autre. L'infertilité peut alors n'être que momentanée.

C'est pour cette raison que le couple doit être accompagné : ce n'est pas la psychothérapie qui va faire avoir un enfant, mais elle permettra à l'homme et à la femme d'être bien ensemble.

Comment se faire aider ?

Le gynécologue n'est pas le mieux placé pour parler sexualité, mais on peut lui demander les coordonnées d'un sexologue ou d'un psychologue.

Ces spécialistes connaissent bien les problématiques de l'infertilité. On peut aller voir un sexologue à quelques reprises seulement, pour débloquer des problèmes et retrouver ou conserver un érotisme. Il ne faut surtout pas se priver de ces possibilités.

Et après un premier enfant ?

Quand un couple a réussi à avoir un enfant et en veut un autre, connaîtra-t-il les mêmes déboires ? L'infertilité ne se soigne pas, on doit repasser par les mêmes étapes. Et il n'est pas évident d'assimiler un vécu souvent difficile.

En parler permet de laisser plus facilement derrière soi ces problèmes. Mais aussi, lors d'une deuxième prise en charge, on n'est plus dans la même démarche, il y a moins de pression, et on sait par expérience que c'est un passage difficile, mais possible à surmonter.

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